Page:Sand - Journal intime.pdf/83

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Pythonisse, de constater par des cris de douleur ou de colère, l’effervescence ou l’abattement de leurs contemporains. Il est certain que ce cri de révolte ou de détresse, dès qu’il est formulé, acquiert une grande force en tant qu’expression et qu’il devient comme le chant de guerre qui ; conduit les nations au combat, ou comme le chant de mort qui met les croyances d’un siècle au tombeau. Mais quelle serait la valeur et la force de ces formules si tous les hommes à qui elles s’adressent Savaient pas l’esprit tout disposé par la force des choses et par l’effet du temps à se tes approprier et a agir selon ses menaces ou les plaintes du poète, selon les besoins du siècle, résumés, exprimés, et vulgarisés par lui. Il est l’alambic où viennent infuser toutes les pensées et tous les sentiments d’une génération, le trépied où la Pythonisse viendra rendre ses oracles, mais qui ne saurait, non plus que la peau du serpent, servir à autre chose qu’à provoquer ses convulsions et à réveiller son angoisse prophétique.

Que les esprits lourds et paresseux reculent devant les nécessités de leur siècle, et, ne comprenant ni ses maux ni ses besoins, ni sa grandeur» ni ses misères, s’efforcent brutalement de le tenir garrotté dans les liens du passé, cela n’est pas étrange. Alors toutes ces déclarations ignares, toutes ces indignations ampoulées partent de bouches impures et d’âmes obstinées aux