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Page:Sand - L Homme de neige vol 1.djvu/176

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Cette conversation délicate fut reprise au troisième intervalle de repos du quadrille dont nos deux jeunes gens faisaient partie.

Marguerite provoquait la sincérité de Cristiano.

— Avouez-le, disait-elle, vous méprisez les filles qui se marient pour être riches, comme Olga, par exemple, qui trouve le baron fort beau à travers les facettes des gros diamants de ses rêves.

— Je ne méprise rien, répondit l’aventurier ; je suis né tolérant, ou les facettes de ma vertu, à moi, se sont émoussées au frottement du monde. J’ai de l’enthousiasme pour ce qui est supérieur à l’esprit du monde, de l’indifférence philosophique pour ce qui suit le courant vulgaire.

— De l’enthousiasme, dites-vous ? N’est-ce pas payer bien cher une chose aussi naturelle que le désintéressement ? Je ne vous demande pas tant, moi, monsieur Goefle ; je ne réclame de vous que l’estime. Croyez donc, je vous en prie, que, si je suis libre de mon choix, je consulterai mon cœur et nullement mes intérêts. Dussé-je ne plus jamais avoir de dentelles à mes manchettes et de nœuds de satin à ma robe, dussé-je ne plus jamais danser à la lueur de mille bougies et aux sons de trente violons, hautbois et contre-basses, je me sens capable de faire ces immenses sacrifices pour conserver la liberté de