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Page:Sand - La Ville noire.djvu/141

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la ville noire.

esprit trop exceptionnel, elle savait bien qu’on vit plus joyeux sur une terrasse que dans une cave.

Un autre changement agréable dans la vie de Sept-Épées fut l’installation de Va-sans-Peur à la baraque, à la place d’Audebert, à qui Tonine avait su persuader de prendre la place que Sans-Peur laissait vide dans un des ateliers de la ville.

Cette résolution avait coûté à Audebert : son orgueil d’ex-propriétaire et d’homme à projets ne se pliait guère à l’austérité du simple compagnonnage. Il avait senti qu’il devenait une charge pour Sept-Épées ; mais il craignait de reparaître en ville, après ses désastres, sous le harnais de la servitude. Tonine, en causant avec lui, découvrit le secret de sa vanité et le moyen de lui donner un autre aliment.

Audebert avait méconnu sa véritable aptitude. Il était poète ; les mots lui venaient en abondance, et sous ces mots il y avait de la peinture et de la vie. Il avait le sens de l’observation idéalisée, et son attendrissement était facilement provoqué par les petits drames de la vie ouvrière. Son erreur était d’avoir cru pouvoir aborder sans culture, et dans