Page:Sand - Laura - Voyages et impressions.djvu/123

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sur ses lèvres, et me montrant les traîneaux, elle me fit signe de la suivre et disparut avant que j’eusse pu la rejoindre.

― Calme-toi, dit mon oncle, Laura voyagera seule dans un traîneau que j’ai amené pour elle. C’est elle désormais qui porte au front notre étoile polaire et qui ouvrira notre marche vers le nord. Nous ne pouvons la suivre qu’à la distance qu’il lui plaira de mettre entre son chariot et les nôtres ; mais sois sûr qu’elle ne nous abandonnera pas, puisqu’elle est notre lumière et notre vie.

Convaincu que, cette fois, j’étais le jouet d’un rêve, je suivis machinalement mon oncle, qui me fit entrer dans le traîneau réservé pour moi. J’y étais seul, couché dans une sorte de lit de fourrure, et, armé d’un fouet attaché à mon bras par une courroie, je ne songeais nullement à m’en servir. J’étais plongé dans une étrange torpeur. J’essayai de me retourner sur ma couche ambulante, comme pour me débarrasser d’un songe extravagant : ce fut inutile ; il me sembla que j’étais lié et garrotté dans ma prison de fourrure.