Page:Sand - Laura - Voyages et impressions.djvu/139

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bée. Était-elle sur un traîneau ou portée par un nuage, traînée par des animaux fantastiques ou soulevée par une bourrasque à fleur de terre ? Je ne pus pas m’en assurer ; mais, durant un temps assez long, je la vis, et tout mon être en fut renouvelé. Quand son image s’effaça, je me demandai si ce n’était pas la mienne propre que j’avais vue se refléter sur la brillante muraille de glace que je côtoyais ; mais je ne voulus pas renoncer à un vague espoir de la revoir bientôt, quelque insensé qu’il pût être.

Les diverses stations et les événements monotones de notre voyage ont laissé peu de traces dans ma mémoire. Je n’en saurais guère apprécier la durée, n’étant pas certain de la date de notre départ du navire. Je sais qu’un jour le soleil reparut, et que la caravane s’arrêta en poussant des cris de joie.

Nous étions sur la terre ferme, au sommet d’une haute falaise moussue ; derrière nous, les immenses glaciers des deux rives du détroit que nous avions franchi s’étendaient à perte de vue vers le sud, et devant nous, la mer libre, sans bornes, d’un bleu