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Page:Sand - Le Dernier Amour, 1882.djvu/146

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surmonter ma répugnance ; il y a là un devoir à remplir, je vous l’ai dit…

— Et, pour vous, le devoir passe avant tout ?

— Oui, mon amie ; c’est ma religion, à moi.

— Pourtant rien ne devrait passer avant l’amour, ce me semble, reprit-elle timidement.

— L’amour profite des sacrifices faits au devoir.

— Comment cela ?

— Il s’élève et s’ennoblit.

— S’élever, s’ennoblir,… oui, voilà mon rêve, mon ambition ! Je crois vous comprendre ; vous voulez triompher de la jalousie, n’est-ce pas ? Eh bien, essayez ; mais prenez garde de ne plus m’aimer quand vous verrez avec indifférence un homme me regarder avec amour.

— Je ne verrai jamais cela avec indifférence, mon amie, à moins que vous n’encouragiez ce regard lascif, qui vous souillerait à mes yeux et aux vôtres.

— Grand Dieu ! s’écria-t-elle impétueusement, que dites-vous là ? Si je ne suis pas parfaite, vous cesserez de m’aimer !

— Je ne sais pas si vous êtes ou si vous serez parfaite sous tous les rapports. Telle que vous êtes ou telle que vous serez, je vous chéris et vous chérirai toujours ; mais, en fait d’amour, je suis exclusif, et je ne comprends pas que la fidélité complète soit une vertu difficile à un cœur aimant.

— Vous savez bien, reprit-elle après un silence, que je n’ai jamais été coquette. Cela n’est pas dans