Page:Sand - Le Dernier Amour, 1882.djvu/320

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pardonné, et vous m’aimeriez à présent comme avant ma faute : tandis qu’avec votre patience et votre vertu vous ne vous êtes pas exhalé (sfogato), et vous gardez sur le cœur un ressentiment qui vous étouffe et ne s’en ira jamais. Ce que je vous dis vous étonne, vous me trouvez sauvage. Eh bien, vous ne l’êtes pas, vous ; aussi vous n’aimez pas, car l’amour est sauvage, et vouloir le moraliser, c’est n’y rien comprendre et ne l’avoir jamais ressenti.

Elle parla longtemps encore en italien sur ce ton de reproche et d’invective, raillant ma conduite, méconnaissant ou dédaignant mon caractère, dépeignant l’amour, dont elle prétendait être l’avocat ou la prêtresse, avec des expressions mêlées de cynisme et de poésie vulgaire, à la manière de Tonino. Elle était de son école depuis qu’elle avait été à son école. La corruption des mœurs avait porté ses fruits, elle avait gagné le cœur ; ce cœur était gangrené, perverti, monstrueusement ingrat. D’une âme généreuse, d’une tête intelligente, d’une vie de force, de reconnaissance, de travail et de dévouement, il ne restait qu’une vanité de femme irritée et des désirs maladifs sans objet déterminé, puisqu’elle était désormais à qui voudrait la prendre.

Je l’écoutais en silence, avec stupeur. Le mépris entrait en moi et pesait sur ma pensée comme un bloc de glace. Je la regardais, je la trouvais laide dans sa beauté maigre et ardente. Demi-nue devant moi, elle ne songeait point à se couvrir, et sa nudité me cho-