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Page:Sand - Le compagnon du tour de France, tome 2.djvu/219

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PROCOPE LE GRAND.

Fidèles au principe de faire avancer la loi de Dieu, et obéissant à la nécessité de constituer et de formuler leurs doctrines, tous les Hussites étaient d’accord sur un point admirable, mais dangereux dans la circonstance : c’était d’employer en discussions sur les matières de foi, en assemblées de docteurs et en synodes généraux ou particuliers, tout le temps qui n’était pas employé à la défense du pays et aux travaux de la guerre. Pendant que le concile de Sienne mettait à prix le sang de la Bohême, on débattait en Bohême les plus hautes questions théologiques. Ce peuple qu’on traitait de barbare, de sanguinaire, d’impie et de débauché, offrait aux yeux du monde étonné le spectacle d’une Église nouvelle qui cherchait à réformer l’ancienne plus radicalement que les conciles œcuméniques, et qui, au milieu des mines, et sous le feu de vingt puissances ennemies, s’efforçait de formuler et d’organiser les bases et la législation de la véritable religion évangélique. Le pape écrivait à l’Empereur qu’il ne concevait pas qu’il ne pût venir à bout d’une hérésie réfugiée dans un petit coin du monde. Ce petit coin était plus grand alors que le monde tout entier ; et la vaste Réforme de Luther était là en germe, avec bien d’autres Réformes encore que l’Humanité accomplira sans aucun doute, et peut-être sans violence, dans un avenir plus ou moins prochain.

Il arriva donc que les docteurs Orphelins, maître Jean Przibram, et maître Pierre de Mladowitz, ami de Jean Huss, se trouvèrent en dissidence sur les matières de foi avec le savant Wickléfite Pierre Payne, dit l’Anglais, et maître Jean de Rockisane, celui qui avait conclu la paix entre les Pragois et Ziska, et qui devait jouer encore un grand et fâcheux rôle dans cette révolution. On verra ailleurs quel était le fond de la dispute, et combien, sous ses formes ardues et mystérieuses en apparence, elle