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Page:Sand - Les Deux Freres.djvu/169

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ou les passions funestes, ou les aberrations misérables de votre père ? madame s’y refusera !

Roger parut se calmer et réfléchir, puis il reprit :

— Que mon père ait été jaloux de la plus belle, de la plus parfaite des femmes, il n’y aurait rien d’impossible ; mais cette jalousie n’aurait pas tenu devant vingt ans de vertu, et tout au moins, à sa dernière heure, mon père eût rappelé Gaston. Tu vois bien qu’il n’y a pas moyen de nier la folie ! Quelque généreuse et pieuse que soit ma mère, elle ne peut éviter la nécessité, elle ne peut pas sacrifier son fils, si sacrifié déjà, à un excès de miséricorde envers le maître qui l’a fait tant souffrir. Elle n’a pas ce droit-là, je ne l’aurai pas non plus. Les droits de mon frère me sont sacrés, et jamais je ne me prêterai à une dissimulation qui tendrait à l’en frustrer.

— Et si votre frère avait des ressources plus considérables que celles qui résulteraient d’un partage entre vous ?

— Le bien de ma mère ? c’est fort peu de chose, et mon père intestat s’en est remis à moi apparemment du soin de son avenir.

— Je ne parle pas du bien de votre mère, mais de celui de M. de Salcède.

Roger tressaillit.

— M. de Salcède ! comment ? pourquoi ? Qu’est-ce que M. de Salcède vient faire dans nos intérêts de famille ?