Page:Sand - Les Deux Freres.djvu/62

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— Alors, madame la baronne, votre idée est excellente ; je m’y rangerais complétement dans le cas où madame la comtesse reviendrait, par excès d’amour maternel, sur la décision que vous lui avez fait prendre aujourd’hui.

— Pourquoi cette restriction, monsieur Charles ? Est-ce que mon idée n’est pas bonne dans tous les cas ?

— Je serais embarrassé de vous bien exprimer ma répugnance. Un mariage avec l’homme accusé à tort ou à raison par le défunt mari…

— Oh ! le défunt mari, s’écria un peu vivement la baronne. Dieu ait son âme et lui fasse grâce ! Quant à moi…

Elle s’arrêta brusquement ; nous traversions la chapelle, car on avait fermé, sans nous savoir dehors, la porte des étables, et nous étions revenus sur nos pas pour traverser cette chapelle, dont la porte sur la cour devait rester ouverte toute la nuit à cause de la veillée du prêtre. En passant devant le catafalque, qu’éclairait tristement la lueur des cierges, madame de Montesparre, qui était au moment de jeter sur le défunt un blâme énergique, fut saisie de peur et prit mon bras par un mouvement nerveux, comme si elle eût vu le comte de Flamarande se dresser hors de son suaire de plomb. Moi, j’éprouvai une émotion non moins vive, mais de surprise et non de frayeur. Le prêtre n’était pas seul à veiller. Il y avait, à peu de dis-