Page:Sand - Les Maitres sonneurs.djvu/222

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bois de la Roche, et dont je ne suis point appelé à dire le motif, Malzac m’a, par trois fois, dit que je mentais, et menacé personnellement. Je ne sais si vous y avez fait attention, mais je le déclare par serment ; et comme je m’en trouve offensé et déshonoré, je réclame le droit de bataille, selon la coutume de notre ordre.

Archignat consulta tout bas les autres muletiers, et il paraît que tous approuvèrent Huriel, car ils se formèrent en rond, et le chef dit un seul mot : « Allez ! » Sur quoi Malzac et Huriel se mirent en présence.

Je voulais m’y opposer, disant que c’était à moi de venger ma cousine, et que la plainte que j’avais portée était d’une plus grande conséquence que celle d’Huriel ; mais Archignat me repoussa, en disant : — Si Huriel est battu, tu te présenteras après lui ; mais si c’est Malzac qui a le dessous, il faudra bien que tu te contentes de ce que tu auras vu faire.

— Que les femmes se retirent ! cria le grand bûcheux ; elles sont de trop ici.

Et en disant cela, il était pâle ; mais il ne reculait point devant le danger que son fils pouvait courir.

— Qu’elles se retirent si elles veulent, dit Thérence, qui était aussi pâle, mais aussi ferme que lui ; moi, je dois être là pour mon frère, s’il y a du sang à arrêter.

Brulette, plus morte que vive, suppliait Huriel et moi de ne pas donner suite à la querelle ; mais il était trop tard pour l’écouter. Je la confiai à Joseph, qui l’emmena à distance, et, posant ma veste, je me tins prêt à venger Huriel, s’il avait le dessous.

Je ne savais point quel serait le combat et je regardai bien, pour n’être pas pris au dépourvu quand mon tour viendrait. On avait allumé deux torchères de résine et mesuré, avec des pas, la place dont les deux combattants ne devaient point sortir. On leur donna à chacun un bâton de courza[1] noueux et court, et le grand bûcheux assista maître Archignat dans toutes ces préparations,

  1. Houx