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Les Maîtres Sonneurs

Première veillée

Je ne suis point né d’hier, disait, en 1828, le père Étienne. Je suis venu en ce monde, autant que je peux croire, l’année 54 ou 55 du siècle passé. Mais, n’ayant pas grande souvenance de mes premiers ans, je ne vous parlerai de moi qu’à partir du temps de ma première communion, qui eut lieu en 70, à la paroisse de Saint-Chartier, pour lors desservie par monsieur l’abbé Montpérou, lequel est aujourd’hui bien sourd et bien cassé.

Ce n’est pas que notre paroisse de Nohant fût supprimée dans ce temps-là ; mais notre curé étant mort, il y eut, pour un bout de temps, réunion des deux églises sous la conduite du prêtre de Saint-Chartier, et nous allions tous les jours à son catéchisme, moi, ma petite cousine, un gars appelé Joseph, qui demeurait en la même maison que mon oncle, et une douzaine d’autres enfants de chez nous.

Je dis mon oncle pour abréger, car il était mon grand-oncle, frère de ma grand’mère, et avait nom Brulet, d’où sa petite-fille, étant seule héritière de son lignage, était appelée Brulette, sans qu’on fît jamais mention de son nom de baptême, qui était Catherine.

Et pour vous dire tout de suite les choses comme elles étaient, je me sentais déjà d’aimer Brulette plus que je n’y étais obligé comme cousin, et j’étais jaloux de ce que Joseph demeurait avec elle dans un petit logis distant d’une portée de fusil des dernières maisons du

M.S.
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