Aller au contenu

Page:Sand - Les Maitres sonneurs.djvu/251

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

plus sûr chemin, jusqu’à Sainte-Sevère, où nous devions prendre congé de lui et de sa fille.

Brulette regrettait, en elle-même, de passer par un pays nouveau, où elle ne revoyait aucun des endroits où elle avait cheminé en la compagnie d’Huriel. Pour moi, j’étais content de voyager et de voir Saint-Pallais en Bourbonnais, et Préveranges, qui sont petits bourgs sur grandes hauteurs ; puis, Saint-Prejet et Pérassay, qui sont autres bourgs, en descendant le courant de l’Indre ; et, comme nous suivions, quasi depuis sa source, cette rivière qui passe chez nous, je ne me trouvais plus si étrange et ne me sentais plus en un pays perdu.

Je me reconnus tout à fait à Sainte-Sevère, qui n’est plus qu’à six lieues de chez nous, et où j’étais déjà venu une fois. Là, du temps que mes compagnons de route parlaient d’adieux, je fus m’enquérir d’une voiture à louer pour continuer notre voyage ; mais je ne pus en trouver une que pour le lendemain, aussi matin que je le souhaiterais.

Quand j’en revins dire la nouvelle, Joseph prit de l’humeur. — Quoi donc faire d’une charrette ? dit-il ; ne pouvons-nous, de notre pied, nous en aller chez nous à la fraîcheur et arriver sur la tardée du soir ? Brulette a fait souvent plus de chemin pour aller danser à quelque assemblée, et je me sens tout capable d’en faire autant qu’elle.

Thérence observa qu’une si longue course lui ferait revenir la fièvre, et il s’y obstina d’autant plus ; mais Brulette, qui voyait bien le chagrin de Thérence, coupa court en disant qu’elle se sentait lasse, qu’elle serait aise de passer la nuit à l’auberge et de s’en aller ensuite en voiture.

— Eh bien, dit le grand bûcheux, nous ferons de même. Nous laisserons reposer notre cheval toute la nuit, et nous nous départirons de vous autres au jour de demain. Et, si vous m’en croyez, au lieu de nous