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lettres à marcie

dation de la pure semence. C’est en cela que, faute de prêtres intelligents et sincères, nous sommes tous prêtres et devons exercer un ministère humble et zélé, chacun dans la mesure de nos forces et dans l’étendue de nos attributions. Ne vous découragez donc pas, Marcie, et ne déplorez plus ni votre isolement ni votre inaction. Pour quiconque sent vivre en son cœur le principe de la fraternité humaine, il y a des devoirs à accomplir, des conseils à donner ; et, pour nous tous qui sommes les créatures de Dieu, il y a des droits à ressaisir, un libre examen à exercer.

Puisque Dieu a placé notre vie entre une foi éteinte et une foi à venir, puisque le prêtre qui tenait sur ses genoux le livre de la destinée humaine n’a pas voulu tourner le feuillet et nous lire la seconde parole du Seigneur, Marcie, il est temps de pourvoir à nos pensées et à nos actions. Ce qui a péri avait sa raison de périr, n’allons donc pas nous lamenter. S’il est encore des âmes croyantes, laissons-les s’endormir, pâles fleurs, parmi l’herbe des ruines ; mais l’homme ne vit et ne marche qu’avec une idée, un désir, un but. Quand les oracles se taisent, l’homme s’interroge lui-même et frappe aux portes de la vie éternelle. Dans un passé, aujourd’hui poussière, ronce et ortie des tombeaux, cherchons si la mort a pu vivre, si la destruction a pu durer. Évidemment non. Ce qui a duré, c’est le devoir et le dévouement que le Christ a divinisés ; le bien, le bon, le beau, n’attendent pas pour éclore un soleil qui ne s’est pas levé. Ce bien, son but et son idéal ne sauraient changer à chaque pas que fait l’humanité ; autrement, où irait-elle éternellement, si ce n’est vers un leurre éternel ? Tenons-nous-en à cette loi des siècles, si bien résumée par