Page:Sand - Ma Soeur Jeanne.djvu/43

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— Je t’avais promis de me remettre sous la tutelle de maman. Si je ne t’ai pas tenu parole tout de suite, ce n’est pas ma faute, c’est maman qui a voulu que je fisse mes réflexions avant de renoncer à mes idées. À présent nous voilà d’accord, je ne veux plus être religieuse. Je ne quitterai plus ma famille, j’étudierai chez nous. Es-tu content ?

— Enchanté, lui dis-je en l’embrassant, car je pense que tu es maintenant et seras toujours aussi sensée que tu es belle et bonne.

Elle rougit en répondant qu’elle n’était pas belle.

— Ma foi si, repris-je. Pour une sainte comme toi, il n’y a pas à en rougir. C’est Dieu qui t’a donné la beauté ; certainement il aime le beau, puisqu’il l’a répandu à pleines mains sur l’univers.

Elle rougit encore plus et alla se cacher comme si le compliment d’un frère l’eût scandalisée ou effrayée. Je ne la jugeai pas encore devenue très-sensée.

Mon père était alors à la maison ; mes vacances commençaient ; nous ne devions pas aller à la montagne cette année-là. Il avait trouvé à louer son auberge pour la saison moyennant un très-beau prix ; nous en eûmes du regret.

— Nous y retournerons l’an prochain, nous dit-il. J’étais connu et aimé là-bas pour le bon marché de