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Page:Sand - Mademoiselle La Quintinie.djvu/207

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jours sans avancer d’un pas, c’est long dans la situation où je suis ! Je perdais patience et j’étais décidé à brusquer un peu les choses, quand une surprenante révélation s’est faite. Je t’écris tout bouleversé encore de l’événement.

Le soir, comme je revenais de Turdy avec Moreali, nous rencontrions madame Marsanne avec sa fille et Henri. Ils rentraient de la promenade, des rafraîchissements les attendaient dans le petit jardin de l’habitation louée par madame Marsanne. Elle nous invite à y entrer. Moreali remercie et nous quitte. Aussitôt Élise me prend le bras avec une vivacité singulière, met un doigt sur ses lèvres, nous attire dans le jardin, regarde si la porte est fermée, et nous dit en éclatant de rire :

« Enfin ! je le connais !

— Qui ? Moreali ?

— Non pas Moreali, c’est quelque nom de guerre, mais l’abbé Fervet ; c’est lui, j’en suis sûre, notre ancien directeur du couvent de *** à Paris !

— Directeur de quoi ? demanda Henri.

— De conscience, rien que ça !

— Votre confesseur alors ?

— Non pas. C’est très-différent. L’abbé Fervet, pour des raisons personnelles que je ne connais pas du tout, avait obtenu dispense de confesser.

— Allons donc ! reprend Henri. Un prêtre qui n’a pas de goût pour cet exercice ? Pourtant ce doit être fort divertissant de confesser les jeunes nonnes et les jolies petites filles !

— Il y a peut-être à cela autant de danger que de plaisir, car nous n’avons jamais eu à dire nos petits péchés qu’à de vieux prêtres plus ou moins octogénaires. On racontait sur notre abbé Fervet toute sorte d’histoires romanesques.

— Quelles histoires ? demandai-je à mon tour.