Page:Sand - Mademoiselle Merquem.djvu/93

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le déclare, mais je me trompe complètement, ou ça y est !

Il faillit m’embrasser. J’avais tellement horreur de moi, que je regardai le tableau et toutes les études qu’il me montra, en m’efforçant d’y trouver du mérite. Je n’en vins pas à bout ; mais j’étais si mécontent de ma conscience, que je me pris de tendresse pour ce pauvre diable. Il valait cent fois mieux que ses tableaux, et le but que je poursuivais n’avait peut-être pas la franchise et la sainteté de son ingrate passion. Il s’aperçut bientôt de mon malaise.

— J’abuse de vous, dit-il, et vous en avez assez…

— Je vous avoue, lui répondis-je, qu’il y a ici une odeur de poisson séché… Vous allez me trouver bien délicat, mais je n’ai pas comme vous l’habitude…

— Oui, oui, sortons, répondit-il ; je pensais avoir tant fumé chez moi, que le poisson n’avait plus la force de chlinguer ; mais il paraît que ça n’y fait rien. Allons voir les récifs, ils sont soignés, mon cher. Ah ! c’est un petit endroit comme je sais en dénicher, et de la solitude, de la tranquillité !… Des habitants délicieux, des braves gens s’il en fut, et pas du tout exploiteurs. Je n’en ai pas encore trouvé comme ça depuis que je fouille la côte. Vous reviendrez me rendre visite, n’est-ce pas ? Je vous vois avec une clarinette de chasse, vous nichez par ici ?

— À une heure de chemin ; mais je craindrais de troubler votre solitude…

— Du tout, du tout ; au contraire, ça me donnera du cœur.

— Alors, je viendrai. Depuis quand donc êtes-vous ici ?

— Depuis huit jours. J’étais à Étretat ; mais il y a