Page:Sand - Narcisse, 1884.djvu/170

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» — Malheureusement, je suis très-sincère, et, quand je vous ai dit que je ne pouvais pas m’empêcher de plaindre Albany plus que vous ne l’en jugiez digne, vous avez conservé, malgré moi, l’idée que je pouvais être follement coiffée de lui et songer à l’épouser. J’espère qu’aujourd’hui vous ne le croyez plus, et que la jalousie de mademoiselle Julia ne vous paraît pas très-fondée. Le ciel m’est témoin que, si j’avais pu ramener cette jeune fille à la décence et à la raison, la rendre digne du mariage, et capable de faire rentrer Albany dans le bon chemin avec elle, je me serais donnée de toute mon âme à les réconcilier et à leur procurer une position. Mais vous voyez où j’en suis avec elle… Et, à propos de cela, il faut que je vous quitte, et que j’aille m’occuper d’elle ; car je n’ai pas encore renoncé à l’amender un peu.

» Mademoiselle d’Estorade allait donc me quitter, en me disant toutefois de rester, parce qu’elle voulait ensuite me faire lire les dernières lettres de ma pauvre sœur relativement à la naissance de Sylvie, lorsque le père Bondois vint nous apprendre que la Julia était partie, partie pour de bon. Elle avait fait son paquet, loué un cheval, et, sans écrire un mot à mademoiselle d’Estorade, sans la remercier de rien, ni s’excuser, ni s’expliquer, elle a si bien disparu, que jamais plus, depuis quatre mois, personne n’en a entendu parler.

» La bonne Juliette s’en affecta. Moi, je lui fis mon