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Page:Sand - Questions d’art et de littérature, 1878.djvu/398

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la reine des Amazones, qui est éprise de Némeith et jalouse d’Hemla. Elle rencontre et poursuit le couple fugitif. Némeith lui échappe, emportant sur son cheval la ziris percée d’une flèche et mourante. Ils fuient toujours au hasard, poussés par l’ouragan qui souffle derrière eux et renverse les forêts sur leur route. La terre s’enfonce et disparaît à mesure qu’ils franchissent les bois et les plaines. Ils cherchent la montagne ; mais Hemla se sent mourir. Elle dit à Némeith de la conduire vers le fleuve Léthé, qui guérit tous les maux.

Némeith obéit, quoique le déluge commence, et, quand il arrive au Léthé un brouillard épais enveloppe la terre et se résout en pluie chaude. Pourtant Hemla est glacée, et cette fois Némeith la crut morte.

« Il s’élança dans l’eau avec son cheval et plongea la ziris à trois reprises. Elle but l’onde bienfaisante, respira, ouvrit les yeux et parla.

» — Sortons d’ici, dit elle. Qui es-tu, toi qui me tiens dans tes bras ? »

Elle avait perdu la mémoire. Ils gagnèrent le rivage, et, sous la pluie qui tombait toujours, lourde, incessante, Némeith s’écria en se roulant de désespoir sur la terre détrempée :

« — Heimdall lui a envoyé la folie !

» — Que fais-tu là ? lui dit la ziris en riant ! »

Quelques-uns des compagnons et amis du Gète l’avaient rejoint avec leurs guerriers.

» — Coq, lui dit Hu-Gadarn, prends courage et partons. La plaine se remplit d’eau, et la lumière du jour s’éteint dans des nuages de cendre.

» — Ce fleuve d’oubli va-t-il déborder et nous priver tous de raison ? dit Némeith.

» Il reprit Hemla sur son cheval, et tous s’éloignè-