Page:Sand - Questions politiques et sociales.djvu/193

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la tradition italienne, et j’y ai trouva Rome deux fois directrice souveraine du mondes, d’abord par les empereurs, plus tard par les papes. J’y ai trouvé que chaque manifestation de la vie italienne est une manifestation de la vie européenne, et que toujours, quand l’Italie succombe, l’unité morale de l’Europe commence à se dissoudre dans l’analyse, dans le doute, dans l’anarchie. Je crois à une autre manifestation de la pensée italienne, et je crois qu’un autre monde européen doit se dérouler du haut de la ville éternelle qui eut le Capitole et le Vatican. Et cette croyance ne m’a jamais abandonné, malgré les années, la pauvreté, les désillusions, et des souffrances que Dieu seul, connaît ! Tout mon être, tout le secret de ma vie, sont dans ce peu de paroles. Mon intelligence peut errer, mon cœur est toujours resté pur. Je n’ai jamais menti, ni par peur, ni par espérance. Je vous parle comme si je parlais à Dieu au delà de la tombe.

» Je vous crois bon. Il n’y a pas d’homme aujourd’hui, je ne dirai pas en Italie, mais en Europe, qui soit aussi puissant que vous. Vous avez donc, saint-père, d’immenses devoirs à remplir. Dieu les mesure aux moyens qu’il accorde à ses créatures.

» L’Europe est dans une crise effroyable de doutes et de désirs. Par l’œuvre du temps, hâtée par vos prédécesseurs et par la haute hiérarchie de l’Église, les croyances sont mortes. Le catholicisme s’est perdu dans le despotisme. Le protestantisme se perd dans l’anarchie. Regardez autour de vous ; vous trouverez des superstitieux ou des hypocrites, des croyants,