Page:Sand - Souvenirs de 1848.djvu/134

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car il y a bien des communistes cachés qu’on découvrira avec le temps.

Mais le sixième candidat, qui est un ouvrier ; celui-là nous plairait bien.

— C’est le pire de tous, il s’enivre du matin au soir, il laisse sa famille mourir de faim, il a des dettes, il lit des livres, il sait écrire : il est trois fois communiste.

— À qui donc se fier ?

— À nous seuls, car le communiste est partout. La patrie est en danger ! Si vous n’y prenez garde, un de ces matins, on proclamera le partage des terres, les six sous par tête, on vous prendra vos femmes et vos enfants, et tout cela parce que vous aurez mal voté. L’histoire enregistrera un jour cette curieuse phase de notre révolution. La postérité aura peine à y croire. Dès aujourd’hui pourtant, on peut en appeler au témoignage ou à la conscience de tous les candidats élus ou non élus de la France. Les uns n’ont réussi qu’en inventant et en accréditant ces plates extravagances ; d’autres que parce qu’ils ont réussi à les déjouer. La majorité a été forcée de jurer respect à la propriété et à la famille, comme si la famille et la propriété avaient couru un danger véritable. Tous les républicains qui ont échoué ont échoué comme communistes. Beaucoup de ceux qui ont réussi peuvent dire si l’accusation de communisme n’a pas failli les faire échouer.

Si cette imputation et les imbéciles calomnies qui s’y rattachent n’avaient servi qu’à fausser l’élection