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Page:Sand - Souvenirs de 1848.djvu/247

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pote par instinct enraciné, libéral par amour-propre et par pressentiment de l’avenir, il subissait alternativement l’influence des jésuites et celle des hommes du progrès. Un désaccord funeste entre la pensée et l’action, entre la conception et la faculté de l’exécuter, perçait dans tous ses actes. La plupart de ceux-là mêmes qui travaillaient à le placer à la tête de l’entreprise étaient forcés d’en convenir ; quelques-uns de ses familiers allaient jusqu’à chuchoter aux oreilles qu’il était menacé de folie. C’était le Hamlet de la monarchie.

Avec un pareil homme, l’entreprise italienne ne pouvait certainement pas réussir. Metternich, esprit non puissant, mais logique, l’avait jugé depuis longtemps, lui et les autres. Dans la dépêche déjà citée, il disait : « La monarchie italienne n’entre pas dans les desseins des factieux. Un fait positif doit les détourner de l’idée d’une Italie monarchique ; le roi possible de cette monarchie n’existe ni au delà ni en deçà des Alpes. Ils marchent à la république. »

Les modérés, dont l’esprit n’était ni puissant ni logique, comprenaient pourtant bien, eux aussi 3 que, quand même Charles-Albert l’aurait voulu, il ne l’aurait pas pu, et, sous cette impression, ils transigeaient en substituant à l’Italie invoquée la puérile conception d’une Italie du nord, de toutes les conceptions la plus mauvaise qu’un cerveau humain pût enfanter.

Le royaume de l’Italie septentrionale sous le roi de Piémont aurait pu être un simple fait créé par la victoire, accepté par la reconnaissance, subi par les