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Page:Sand - Souvenirs de 1848.djvu/253

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terrain, faute d’armes et de munitions. La fermentation continuait toujours à Turin. Un rassemblement de peuple demandait des armes au ministère de l’intérieur ; il était repoussé. Le comte Arese, arrivé de Milan pour demander qu’on vînt en aide à l’insurrection, ne réussit pas même à voir le roi, fut froidement accueilli parles ministres, et repartit le même jour, découragé, désillusionné.

Le 21, les nouvelles étaient meilleures. Ce fut le comte Henri Martini, agent voyageur des modérés, qui fit aux hommes de la municipalité milanaise et du conseil de guerre la première proposition de secours royal, à condition d’une reddition absolue et de la formation d’un gouvernement provisoire qui en ferait l’offre. Honte éternelle aux courtisans qui, nés Italiens, trafiquaient, pour une couronne, du sang des braves jaloux de mourir pour la patrie, au moment même où Martini disait à Cattaneo : « Savez-vous qu’il n’arrive pas tous les jours de pouvoir rendre pareil service à un roi[1] ? » — À un roi ! — Le dernier des ouvriers qui se battaient gaiement sur les barricades pour la bannière de l’Italie, sans se demander à quels hommes profiterait la victoire, valait devant Dieu et vaudra un jour devant l’Italie plus que dix rois ensemble.

Le 22, la victoire couronna cette lutte héroïque. Porta Tosa, reprise par Lucien Manara (plus tard martyr de la cause républicaine à Rome) ; Porta Ticinese,

  1. Cattaneo, pag. 68.