Page:Sand - Souvenirs de 1848.djvu/52

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s’épuise à donner sans recevoir des avantages, supérieurs pour chacun au sacrifice de chacun, on est blessé et on perd patience. Ainsi, jusqu’à présent, l’agriculture a été abandonnée, les accidents des mauvaises années n’ont été ni prévus ni réparés, le commerce des produits de la terre a enrichi des spéculateurs étrangers au travail des champs, et, l’an dernier, nous avons vu celui qui avait fait pousser le blé et celui qui était forcé de Tacheter, aussi malheureux l’un que l’autre, parce que le blé passait par les mains de gens qui avaient intérêt à le faire renchérir.

Sous la République, de pareils malheurs n’arriveront plus. L’État aura la prévoyance d’un bon père de famille, et les infidélités de la gestion générale ne seront plus possibles, chaque citoyen ayant part au gouvernement de la nation.

Sous la monarchie, l’impôt nous donnait droit à tous les avantages de la civilisation. Nous payions pour avoir une marine, et nous n’en avions pas ; pour avoir une armée, nous en avions une belle et brave : mais, excepté en Algérie, où encore on faisait durer la guerre sans profit pour notre honneur véritable, nous n’avions que de la honte à souffrir de la part des autres nations. Nous payions pour avoir de l’instruction, et nous n’en avions pas ; pour avoir de bons administrateurs, et nous n’avions que les domestiques de la monarchie, oublieux de nos intérêts. Nous payions pour les travaux publics, et nous n’étions point défendus contre les inondations qui, à différentes fois, ont ruiné dernièrement les plus beaux pays de