Page:Sand - Souvenirs et Idées.djvu/57

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Vous voyez bien, Proudhon, qu’au lieu de les faire tenir tranquilles vous allez augmenter leur rage de députation si vous leur dites qu’ils ne sont bons à rien d’ailleurs. Il faudrait, au contraire, leur démontrer, parce que cela est vrai, qu’ils ont une mission qui leur convient mieux et dans laquelle ils serviront mieux la société !

Mais est-ce aux artistes que Proudhon fait la guerre, à ces artistes de notre temps, qui, pour la plupart, il faut l’avouer, ne sont nullement démocrates, nullement politiques, nullement socialistes et même fort peu patriotes ? N’est-ce point à l’art qu’il prétend faire le procès ?

Non, ce n’est point à l’art, c’est à la théorie rebattue de l’art pour l’art, cette chimère des vingt dernières années. En ce cas, c’est justice, mais c’est frapper un peu dans le vide ; car l’art pour l’art n’a jamais existé et n’existera jamais. Toutes les fois qu’un homme intelligent essayera de cultiver la forme et de laisser aller le fond au hasard, il cessera d’être artiste et fera quelque chose qui n’aura ni sens ni valeur. Quand même le fonds serait mauvais, coupable, funeste,