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Page:Sand - Tamaris.djvu/114

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C’est égal, j’aime autant qu’il la garde que de me la prêter seulement pour une semaine : je n’aurais qu’à dire un mot de travers, elle serait dans le cas de m’arracher les deux yeux.

— Mais, docteur, prenez garde à vous en effet ! dit la marquise, qui, penchée en avant, écoutait le babil de son conducteur ; si vous ne la guérissez pas, elle vous assassinera.

— Oh ! elle n’est pas traître ! reprit Marescat ; c’est la colère, voilà tout !

— Cela doit tenir à un état maladif. A-t-elle toujours été ainsi ?

— Mais non. Au commencement de son mariage, elle était un peu braillarde et reprocheuse, et puis les autres femmes la faisaient monter. On n’aime ni les Niçois, ni les Monuquois, ni tous ceux de par là, et on en voulait aux garçons qui la trouvaient de leur goût. Oh ! dame, les femmes d’ici ne sont pas bien commodes non plus, il faut le dire, et menteuses !… Savez-vous comment ça s’appelle, ce petit lavoir que vous voyez là au bord du chemin ?

— Dans mon pays, on appelle cela une babille, parce que c’est le rendez-vous des femmes de la campagne.

— Ici, ça s’appelle une mensonge, reprit Marescat en riant, et c’est bien appelé, je vous dis !

— Êtes-vous marié, Marescat ? lui demanda la marquise.