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Page:Sand - Theatre complet 1.djvu/441

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MADELEINE.

Vous m’avez traitée comme une sœur qu’on protège en même temps qu’on la respecte dans toutes les délicatesses de son cœur et de son esprit. Mais, moi, j’ai toujours senti la déférence que je vous devais. Je ne sais point si mon instinct avait deviné votre génie, mais il connaissait les grandeurs de votre âme, et cela me suffisait pour vous suivre et vous croire en toutes choses.

MOLIÈRE.

Eh bien, oui, parlez-moi de ce dévouement si pur, si beau ! n’en ai-je point mésusé quelquefois ?

MADELEINE.

Jamais que je sache !

MOLIÈRE.

Quoi ! je ne vous ai jamais fait souffrir ? j’ai toujours été digne de votre confiance ? Quand je vous jurais que je n’aimais point votre sœur, que je ne l’épouserais jamais, je ne vous ai point trompée ?

MADELEINE.

Vous étiez de bonne foi.

MOLIÈRE.

Oh ! devant Dieu, je le jure ! Et cependant, j’ai manqué à la parole que je vous avais donnée, à celle que je m’étais donnée à moi-même !

MADELEINE.

Vous en avez été relevé, le jour où j’ai vu dans votre cœur plus clair que vous même.

MOLIÈRE.

Oui, sainte et douce fille, tu l’as fait ! Mais, moi, t’ai-je consultée ? Ai-je attendu ta permission pour le crier : « Je l’aime, ta sœur, je la veux ! » N’ai-je point été brutal, égoïste, aveugle ?

MADELEINE.

Pourquoi ces craintes, Molière ? Vous ai-je donné lieu de douter de vous-même ou de moi ?