Page:Sand - Theatre de Nohant.djvu/308

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mettons le sujet en action. Nous faisons passer le docteur, Isabelle et Scaramouche. Cinthio et Mezzetin, sur le premier plan de la scène, les observent sans être vus. Scaramouche, c’est moi ; Desœillets, venez figurer le docteur.

SŒUR SYLVIE.

Puisque vous faites le Scaramouche, monsieur Marielle, je puis bien faire l’Isabelle pour vous aider ; je ne saurai rien dire, mais vous aurez un personnage à qui parler.

SŒUR COLETTE.

Oh ! bien dit ! Sachez, mon frère, que la sœur Sylvie joue en perfection.

FABIO.

En vérité ! la novice ?

SŒUR SYLVIE.

On représente de certaines pièces de théâtre au couvent, je fais ma partie comme une autre.

SŒUR COLETTE.

Mieux qu’une autre ! mieux que toutes les autres ! Allons, courage, Sylvie ! ne vous troublez point, vous jouez bien, je m’y connais.

MARIELLE, faisant le Scaramouche.

« Mademoiselle, vos perfections m’ont garrotté le cœur d’une si fière manière… que… » Eh ! les mots ne me viennent point, je ne saurais railler avec cette noble Isabelle ; le costume m’impose et la personne encore plus, je compte que je vais rougir et me défaire comme un apprenti.

SŒUR COLETTE.

Joue donc, joue donc, Scaramouche ! il y a si longtemps que je suis privée de t’entendre !

MARIELLE, jouant.

« Mademoiselle, j’étais résolu, en vous abordant, de vous faire un discours tout pur d’amour, plein de feux, de flèches et de cœurs navrés ; mais je vous avoue que je vous crains au de là de ce que vous pourriez imaginer, et le respect m’empêche de vous dire que je vous aime encore plus que je ne vous crains. »