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Page:Sand - Tour de Percemont.djvu/326

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tés et clairvoyants d’un gros garçon sans scrupule et sans irrésolution, c’est à son profit qu’elle va se venger de ma sottise. Que la vengeance lui soit douce, et qu’elle soit heureuse ! nous n’avons pas d’autre souhait à former. Je prétends m’exécuter de bonne grâce et approuver son choix sans arrière-pensée.

— Tu as tort, mon Pierre. Si tu le voulais bien, il serait temps encore ! mais tu ne le veux pas, tu ne l’aimes pas, ma pauvre Marianne ! c’est un malheur pour elle. Tu l’aurais rendue heureuse, elle ne le sera pas avec un homme qui lui est par trop inférieur.

— Si elle a la supériorité dont tu la gratifies, elle s’en apercevra à temps ; elle n’a pas encore dit oui.

— Tu doutes qu’elle soit intelligente, voilà je te trouve bête, moi, permets-moi de te le dire ! Je sais bien que je ne peux pas être un juge pour toi et que tu dois te dire que je ne m’y connais pas. Je sais aussi qu’il est difficile de juger l’esprit d’une personne qui ne veut pas montrer celui qu’elle a ; mais, quand on a envie d’aimer quelqu’un, on cherche, et, quand on aime, on devine. Si tu aimais…

Pierre baisa la main de sa mère avec une émotion qu’il réprima aussitôt. Il avait failli lui dire que, depuis quelques jours, il était en proie à la tentation d’aimer, et que peut-être il aimait