Page:Sand - Tour de Percemont.djvu/60

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— Attendez ! quand son père, en mon absence, l’eut mise au couvent en lui disant qu’elle n’en sortirait jamais, il y eut, m’a-t-on dit, de grandes scènes de désespoir. Les religieuses la traitèrent avec beaucoup de douceur et de bonté. Elle prit très-vite son parti, et, comme on lui parlait du bonheur de la vie religieuse, elle dit qu’elle n’était pas éloignée d’en essayer. Elle se montra effectivement très-pieuse, et ces dames la prirent en amitié. Quand M. de Nives, devenu mon mari, me ramena dans ce pays-ci, j’allai m’informer d’elle. Elle était très-dissipée et très-paresseuse ; elle n’apprenait rien, mais on la croyait bonne et sincère. Je demandai à la voir. Elle me fit bon accueil ; elle s’imaginait que j’allais la ramener chez elle. Je dus lui dire que je rendrais bon compte de sa conduite à M. de Nives et que je plaiderais sa cause, mais que je n’avais pas la permission de l’emmener tout de suite.

Et comme, en m’approuvant, la supérieure m’appelait madame, Marie lui demanda pourquoi elle ne me disait pas mademoiselle. On avait eu le tort de lui laisser ignorer que je revenais mariée et que j’étais désormais madame de Nives. Il fallut s’expliquer. Elle entra dans un transport de rage épouvantable, il fallut l’emmener de force et l’enfermer. Sa fureur passa aussi vite qu’elle était venue. Elle avait alors treize ans et demi. Elle voulait entrer tout de