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Page:Schlagintweit - Le Bouddhisme au Tibet.djvu/304

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ANNALES DU MUSÉE GUIMET

dans le cycle hindou ; toutefois le nombre des cycles ne concorde pas, vu que les Indiens ne datent pas de l’an 1026, mais d’une ou même deux autres périodes antérieures[1].

Depuis longtemps déjà, au moins depuis la dynastie Han, soit 206 av. J.-C., les Chinois mesuraient le temps par cycles de soixante ans, période formée par la combinaison de séries décimales et duodécimales. La coïncidence du cycle chinois et tibétain n’est pas parfaite ; la troisième année du cycle chinois équivaut à la première de la période tibétaine, et ainsi de suite. Toutefois cette différence n’eut aucune influence sur la chronologie tibétaine tant que la Chine n’exerça pas d’autorité politique sur ce pays ; mais quand en 1818[2] le gouvernement chinois s’annexa le Tibet, les habitants de ce pays furent bientôt obligés de conformer leur calendrier à celui des Chinois, ce qui ne put se faire qu’en sautant deux années. Deux années ont donc été virtuellement effacées du calendrier tibétain, de telle sorte que le cycle commence deux ans plus tôt que précédemment, par exemple en 1864 au lieu de 1866. Cette chronologie modifiée est actuellement en usage dans tous les actes officiels et on l’a généralement adoptée pour les affaires privées.

À l’appui de cette explication, je citerai le document de Daba[3]. Il est daté du sixième mois (juillet) de l’année Bois-Lièvre. Cette année est la cinquante-deuxième du cycle. Si on ajoute cinquante et un à 1806 (et non cinquante-deux, parce que 1806 est la première année d’un nouveau cycle, le quatorzième de la chronologie indo-tibétaine), nous obtenons comme résultat 1857.

  1. Voyez Csoma, Grammar, p. 148.
  2. Köppen, Die Religion des Buddha, vol. II, p. 196.
  3. Il est intitulé Lam-gig-dang-ming-dang-yar-na, « ordre de route ; », et aussi « désignation de la distance » ; il fut fait à Nyougchang, halte à environ 8 milles au sud de Daba. Adolphe s’engageait à payer une somme de 6 Srang (onces) d’or (environ 60 liv. st.) à l’officier chinois de Daha, si lui ou son frère Robert pouvaient traverser la rivière S’atlej : le chef de ses hommes, nommé Bara-Mani, ou simplement Mani, s’engagea à payer cette somme. Le traité fut écrit par le Chinois lui-même, qui, au lieu de sa signature, y apposa le sceau officiel. Adolphe n’ayant pas de cachet sous la main, le timbra avec le pommeau de sa cravache. Le Lama Gombojew transcrivit l’original en lettres capitales, tel qu’il est imprimé planche XXXVI. Mais là aussi (voyez. p. 117) il se présente tant de différences avec les termes des livres sacrés, qu’il a été impossible de le traduire. Le professeur Schiefner, qui avait eu l’obligeance de chercher des documents analogues en langue moderne dans la bibliothèque de Saint-Pétersbourg, n’en trouva aucun qui donnât les moyens de traduire littéralement soit le document de Daba, soit celui de Himis.