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deuxième plan, comme acteurs ; ils constituent plutôt des moyens d’action. Les plus fréquemment en scène sont : l’aigle, l’épervier, le corbeau, la colombe, le roitelet, le rouge-gorge, le coq, la poule, la cane, le lion, l’ours, le renard, le loup, le lièvre, le cheval, le chien, le bœuf, le mouton, l’âne, le mulet, la souris, le serpent, le crapaud, la fourmi. Le premier sujet du conte, en outre de l’innocent, est le nain ou lutin, dont il existe une cinquantaine de variétés, classées par M. Sébillot sous autant de dénominations distinctes. Le nain breton forme un diminutif de démon-sorcier, malin et farceur, avec le sentiment de la gratitude et, parfois, de la bienfaisance. Le diable qui, dans la légende, vient tout de suite après l’innocent, est communément aussi un diable d’un caractère tout particulier : non le sombre génie du Paradis perdu, ni le terrible Satan de l’Église, mais un assez brave homme de compère, sociable, gouailleur, obligeant, facétieux, et juste assez retors pour faire ressortir la finesse de ses adversaires. Le peuple qui a manifesté une franche sympathie pour le Juif Errant, et qui a tempéré, une fois par semaine, le supplice de Judas, en souvenir d’une aumône de l’Iscariote à un lépreux, n’est pas toujours dénué de compassion pour le diable, ce souffrant ; par ailleurs, on lui joue toutes sortes de mauvais tours, et, en général, on le berne. L’audacieux mènera-t-il à bien son entreprise ? Le diable emportera-t-il une âme de plus en enfer ? Voilà, d’habitude, l’intérêt respectif du conte et de la légende. L’audacieux réussit toujours, et le « vieux Guillaume » échoue. Dans le Diable devenu recteur, légende recueillie par Souvestre, « l’ange qui porte des cornes » emmène cependant avec lui les trois seules familles d’élus qu’il y avait dans une paroisse. Mais ainsi qu’il le dit au Nazaréen : « Tu m’avais défendu de les tourmenter, non de les enrichir, et je l’ai fait. Pour rendre les hommes méchants, il y a un plus sûr moyen que de leur faire du mal : c’est de leur faire du bien. »

Les acteurs secondaires du merveilleux bas-breton n’ont rien qui mérite d’être particulièrement signalé, sauf les lavandières et le tailleur. Les lavan-