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MAROUSSIA

lui comme sur un protecteur. C’était un autre soldat qui l’avait remplacé à sa droite.

« Qu’elle est petite, cette créature-là ! dit ce soldat à un de ses camarades, après avoir jeté un regard sur Maroussia.

— Pas plus grande qu’un nœud sur un fil de soie, répondit un autre soldat.

— Et elle n’a peur de rien, elle voyage comme un colonel de hussards.

— Je parierais qu’elle ne craint ni poudre, ni balle ! continua le premier.

— Et elle a raison, ajouta le troisième. Quelle balle pourrait être dangereuse pour un grain de pavot ? Est-elle autre chose ?

— Je connais les Ukrainiens, dit le premier ; on ne peut pas dire que ce soit un peuple de lièvres. Même les petites filles sont vaillantes dans ce pays. J’ai vu de mes propres yeux, plus d’une fois, de quoi elles sont capables : le canon tonne, la fusillade pétille, le sang coule par ruisseaux, la terre tremble, on gémit, on crie, on hurle, on s’égorge, on meurt ! et elles viennent sur le champ même de bataille, elles y marchent, elles y ramassent leurs blessés comme si elles se promenaient dans un jardin en y cueillant des coquelicots !

— Aussi en meurt-il par mille et deux mille ! dit un autre.

— Bah ! nous mourrons tous d’une manière ou