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MAROUSSIA.

grossière qui la recouvrait fût blanche comme la neige. Il aurait voulu voir la figure, mais le grand ataman était dans un grand jour de bonté et avait dit au vieillard :

« Tu peux garder ton bonnet, mon vieux. »

Le musicien, après avoir préludé, se mit à chanter.

Quelle puissante et douce voix il avait, et quel talent !

L’ataman, artiste à ses heures, s’en trouva réveillé. Le chant était beau. C’était une de ces hymnes chrétiennes qui remettent l’homme et son âme en présence du Créateur. Attirées par ce chant magnifique, la femme du grand ataman et sa belle-sœur se montrèrent à l’extrémité de la terrasse, tout près du vieux rapsode.

Méphodiévna reconnut la petite fille qui lui avait remis le mouchoir rouge, et qu’elle avait engagée à se présenter au château.

Accoudée sur une grande caisse dans laquelle fleurissait un arbuste rare, elle fit signe à Maroussia de venir à elle. Si haute était la caisse et si petite l’enfant qu’elle la cachait entièrement à l’ataman, et même au seigneur russe.

L’enfant tira de sa manche un poignard et le glissa dans la poche de la robe de la belle-sœur.

La belle-sœur vit-elle ce mouvement ? Sa figure n’en montra rien. Ses grands yeux perdus dans l’espace étaient tout à la musique.