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22 REVOLUTION FRANÇAISE.


chefs. Ces beys avaient chacun cinq ou six cents Mameluks. C’était un troupeau qu’ils avaient soin d’alimenter, et qu’ils transmettaient quelquefois à leur fils, et plus souvent à leur Mameluk favori, qui devenait bey à son tour. Chaque Mameluk était servi par deux fellahs. La milice entière se composait de douze mille cavaliers à peu près, servis par vingt-quatre mille ilotes. Ils étaient les véritables maîtres et tyrans du pays. Ils vivaient ou du produit des terres appartenant aux beys, ou du revenu des impôts établis sous toutes les formes. Les: Cophtes, que nous avons déjà dits livrés aux plus ignobles fonctions, étaient leurs percepteurs, leurs espions, leurs agents d’affaires; car les abrutis se mettent toujours au service du plus fort. Les vingt-quatre beys, égaux de droit, ne l’étaient pas de fait. Ils se faisaient la guerre, et le plus fort, soumettant les autres, avait une souveraineté viagère. Il était tout à fait indépendant du pacha représentant le sultan de Constantinople, le souffrait tout au plus au Caire dans une sorte de nullité, et souvent lui refusait le miri, c’est-à-dire l’impôt foncier, qui, représentant le droit de la conquête, appartenait à la Porte. L’Égypte était donc une véritable féodalité, comme celle de l’Europe dans le moyen âge; elle présentait à la fois un peuple conquis, une milice