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Page:Visan – Lettres à l’Élue, 1908.djvu/131

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larges côtes. Sur la place de la gare, dans la rangée des omnibus, je distinguai aussitôt la vieille jument grise attelée au « panier » surmonté de son dais à franges et, sur le siège, le fils du fermier. Ce dernier me salua avec ce même chapeau de premier communiant, en paille jaune, cerclé d’un ruban, que je lui ai toujours connu. Jadis, il venait ainsi m’attendre à ce train de neuf heures du soir, lorsque le temps des vacances fermait mon collège de Lyon. Ces trois ans d’absence n’avaient pas accru ni ralenti l’enthousiasme de mon cocher. Notre reconnaissance se fit sans longues phrases, avec les mots banaux et nécessaires qui accueillent toute bienvenue.

Je fus enchanté de cette attitude. J’avais si peur qu’on me sautât au cou ! Ainsi donc, rien n’était changé autour de moi ; les êtres et les choses m’entouraient des mêmes présences et dégageaient les mêmes pensées. C’était le même serviteur malin à l’air niais, la même jument pommelée, la même voiture bien dauphinoise ; je n’avais qu’à prendre