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Page:Walch - Anthologie des poètes français contemporains, t1.djvu/188

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lors, le célèbre romancier marcha de succès en succès. Sa vie et ses œuvres sont trop connues du public pour qu’il puisse paraître utile de les remémorer ici. Rappelons seulement qu’Alphonse Daudet fut pendant cinq ans secrétaire du duc de Morny, et que cette place lui permit de recueillir de nombreuses observations dont il fît plus tard profiter le public dans ses livres, en particulier dans le Nabab. Tombé malade, il fut obligé de quitter Paris et se guérit en Algérie et en Corse, « et ces deux noms, dit avec infiniment de raison Gustave Geffroy, achèvent d’évoquer la nette lumière, la fine et brûlante atmosphère qui éclairent et chauffent l’œuvre de l’écrivain méridional fixé, depuis, à Paris. » On peut définir Alphonse Daudet « le poète du roman ». « Il eut, du poète, le don d’imagination, et du romancier, l’esprit d’observation. L’une et l’autre faculté, qu’on dirait contradictoires, s’unirent en lui merveilleusement. À l’origine, le poète prédomina un peu, puisque, dans l’aube rose de l’adolescence, il est naturel que l’imagination surtout fermente, flambe, fleurisse, feu et fleurs ! Si cet état d’âme eût persisté, si Alphonse Daudet, au surplus, fût demeuré dans son Midi natal, il est possible que nous eussions compté un poète de plus, écrivant aussi en provençal, émule de Mistral et de Roumanille… » ({{sc[georges Rodenbach}}, L’Elite.)

Il semble permis de conclure avec Gustave Geffroy que « si Daudet n’est pas reste attaché à la forme du vers, du moins il n’a pas eu à désavouer sa tentative ; il a mis la subtile empreinte de ses premières années sur ces chansons inconsciemment chantées. Pour se servir d’une comparaison presque empruntée à ce délicat recueil de la dix-huitième année, on peut bien dire que Les Amoureuses restent comme un verger de printemps avec des arbres blancs et roses odorants comme des bouquets, tout doré de soleil, tout plein de voix, traversé par des robes claires, obscurci par instants sous un nuage d’orage. Depuis, l’écrivain en marche a quitté ce beau jardin, il est parti par les routes, il a traversé des forêts, il s’est frayé un âpre chemin à travers des espaces vierges. »