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Page:Walch - Anthologie des poètes français contemporains, t1.djvu/207

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sème des bleuets sur l’oreiller des reines,
Il pique un rayon d’or au toit le plus obscur.

Alors, dans l’âme en deuil, tout est joie et lumière ;
Le pâtre devient prince, et palais la chaumière :
On combat, on triomphe, on aime, on est aimé…

Mais l’aube, en souriant, le chasse, à coups de roses,
Et le Songe qui fuit les paupières mi-closes
Y laisse, perle humide, un long pleur embaumé.


(Rêves et Combats.)


SUR UNE CROIX DE VILLAGE
Inter rubeta lilium.

Par un matin d’octobre, au temps de la vendange,
J’ai vu la blonde enfant passer dans le chemin ;
Passant aussi, la Mort la toucha de la main…
Les lis sont donc trop purs, hélas ! pour notre fange,
Ou si le Ciel jaloux nous enviait cet ange ?
Réponds, ô fleur d’un jour, qui fus sans lendemain !


(Rêves et Combats.)


OCTOBRE


Déjà, dans le grand parc, le hêtre se défeuille,
Ridant de son or roux le miroir des bassins ;
L’églantine, bercée aux bras du chèvrefeuille,
Egrène son corail sur les buissons voisins.
Ah ! qu’elle a meilleur prix, la fleur qu’alors on cueille !
Qu’il est bleu, le rayon où dansent mille essaims !
Comme l’herbe des bois qui, mourante, l’accueille,
Au rêveur égaré fait d’odorants coussins !
Ainsi de ton soleil, Octobre de la vie…
Sa clarté ne sera de nulle autre suivie ;
S’y noyer, pour le cœur reste un besoin jaloux…
Donc, qu’au dernier rameau fleurisse la tendresse !
Si moins vive est l’ardeur, plus longue est la caresse,
Et la lèvre pâlie a le baiser plus doux.

(Les Saisons et les Mois.)