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Page:Walch - Poètes d’hier et d’aujourd’hui, 1916.djvu/387

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A. C.
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Bibliographie. — Pierrot cocu, poème dialogué (P.-V. Stock, Paris, 1905) ; — Jeux de Fumée, poèmes (P.-V. Stock, Paris, 1907).

Ô pur Esprit français pétillant d’ironie
Ailée et capiteuse, ô clair et fin génie
De notre race, ô toi, fils du vieux sol gaulois,
Qui tutoyais les Dieux et qui narguais les rois ;
Bon Coq dont le refrain émerveillait le monde,
Ô toi qui flagellais tous les sots a la ronde
Et souffletais d’un mot la médiocrité,
Esprit fait d’élégance et de limpidité…

Ces lignes, empruntées à l’épilogue de Pierrot cocu (1905), sont caractéristiques pour le spirituel et verveux auteur de cette bonne vieille — et pourtant si jeune — comédie italienne écrite en vers excellents, « sans pudibonderie », mais aussi « sans grossièreté », et dont la saine gaieté rappelle les vieux maîtres du rire. Cependant, s’il y a dans cette pièce une vis comica irrésistible, il n’en faut point conclure que la joie et la gaieté soient prédominantes chez l’écrivain anonyme à qui nous devons cette délicieuse fantaisie. Par un phénomène assez commun chez les meilleurs comiques, le poète a cherché dans le rire un dérivatif à sa douleur, douleur profonde et incurable, et d’autant plus cruelle que, par une fierté qui nous le rend particulièrement sympathique, il la cache, dans le monde, sous un masque d’impassibilité. Son récent volume Jeux de Fumée (1907) est singulièrement explicite à cet égard. La mort d’un père aimé a fait au cœur du fils une blessure que les années n’ont point cicatrisée ; le désespoir, le doute, se sont emparés de son âme, et désormais la vie n’est pour lui qu’un long supplice, une lutte inégale contre le Destin. Cette lutte, il l’a engagée sans crainte, et sans autre espoir que la Mort qui délivre. Ce qui le soutient, c’est le souvenir toujours vivace de l’être vénéré qu’il pleure, et le culte souverain de l’Idéal de Beauté, le seul bien qui lui soit resté dans le naufrage de ses croyances :

Et nous Poètes, nous, Prêtres de la Pensée,
Aux pieds de la Beauté par nos mains encensée,
               Nous prions à genoux…

Outre un magnifique poème, Maria-Magdalena, et des hym-