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XXII


Voilà trois ans que nous sommes mariés, Jacques et moi. Nous habitons les Tilleuls, et je vais clore définitivement ce journal intime car les gens heureux sont comme les peuples heureux : ils ont pas d’histoire et notre ménage se compose d’un homme et d’une femme de cette catégorie privilégiée.

Ma mère demeure avec nous depuis le jour de notre mariage.

Elle eut, d’abord, quelque peine à s’accoutumer au milieu nouveau où on l’installait. Cependant, ma présence continuelle aida beaucoup à l’acclimater. Mais le miracle attendu, l’étincelle qui devait, soudain, illuminer son cerveau et lui rendre la raison, ne se manifesta point tout de suite. Affectueuse avec moi, sensible au charme de la musique, aux grâces de la nature, à la coquetterie des vêtements dont on l’habillait, tout le reste paraissait lui être profondément indifférent et, longtemps, elle sembla ne pas s’apercevoir de l’existence de mon mari.