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ÂME BLANCHE

son réveil, jusqu’à la mi-juin ; cela faisait partie de son hygiène intime et personnelle.

Les allées du jardin étaient semées d’un cailloutis blanc, pointu, agressif, qui usait les bottines, et toutes les fois que mes jeux solitaires m’amenaient vers ce lieu de délices, j’avais à subir tant de recommandations avant d’y pouvoir pénétrer que je finis par m’y rendre exclusivement pour y accomplir ma tâche : débarrasser les plates-bandes du chiendent et des pissenlits qui y poussaient à foison, malgré mon zèle ; récolter les fleurettes de la camomille quand elles étaient à point pour la provision d’hiver, ou bien, la graine mûre des tulipes et des hortensias, qui était, ensuite, précieusement serrée en des sachets de papier fort, pourvus d’une étiquette, et dont ma tante avait la garde.

Ce jardin, où le soleil lui-même paraissait maussade, où il ne se montrait jamais franchement, mais, d’une manière oblique, hésitante, sournoise, contrarié qu’il Y était par tant de murailles, ce jardin ne m’attirait pas. Même, lorsque Véronique m’y conduisit, après ma maladie, Mme Veydt ne put prendre sur elle de nous épargner les remontrances au sujet des fruits qu’il ne fallait pas cueillir, du gazon qu’il ne fallait pas fouler, des bordures qui, disait-elle, avaient droit à notre respect car elles étaient de fer peint et coûtaient cher !