Page:Yonge - L'héritier de Redclyffe, Vol 1, 1855.djvu/240

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le tentateur n’était pas défait complètement ; ce n’était pas assez de renoncer à sa première intention de se venger (en demandant son cousin en duel, comme il le voulait d’abord) ; il fallait aussi ne pas garder rancune, ne pas le soupçonner de mauvaises intentions qu’il n’avait peut-être pas eues. Car enfin, sa demande d’argent avait pu paraître déraisonnable ; pour ce qui était du reste, n’était-ce pas faire injure à un homme d’honneur, comme Philippe, de le croire capable d’une calomnie ? Sans doute il était dans l’erreur, et croyait avoir agi sensément et prudemment, quoique peut-être il ne se fût pas conduit en ami. S’il avait poussé son oncle à écrire cette lettre, c’était sans doute pour sauver Amable ; il aurait pu s’y prendre autrement, mais l’intention devait faire pardonner le procédé. Quand Walter se rappelait sa fureur et ses intentions meurtrières, il se demandait comment il pouvait espérer de mériter l’amour de cette douce jeune fille ? Il était effrayé de lui-même, car ses colères d’enfant n’étaient rien auprès de ce qu’il venait d’éprouver. Cependant, au moment où il leva les yeux et vit le soleil disparaître derrière l’horizon, la victoire était gagnée.

Il se leva, regarda à sa montre, s’étonna qu’il fût si tard, reconnut l’endroit écarté où il se trouvait, et retourna lentement à South Moor, encore oppressé d’un sentiment de honte et de regret.