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Page:Yver - Cher coeur humain.djvu/166

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avaient secoué d’émotion secrète les magistrats impassibles !

Ceux-ci furent étonnés devant cette campagnarde qui prêtait serment avec tant d’aisance, dépouillée de toute gaucherie et pleinement assurée en usage : même, disons le mot, en noblesse. On lui demanda ce qu’elle savait sur les inculpés.

— Ce que je sais, monsieur le juge, ce que je sais sur eux ? Plus long que les gendarmes, et plus long que tout mon village, certes, car je les ai vus arriver sur moi comme des loups furieux ; oui, à quinze ans et demi et à dix-sept ans, ils en étaient à venir tuer une vieille femme afin d’avoir un peu d’argent. Et pour quelques bonnes paroles qui me sont sorties toutes seules du gosier devant tant de jeunesse et tant de méchanceté, j’ai eu aussitôt sous les yeux des agneaux. Fallait-il donc que jamais il n’en soit parvenu à leurs oreilles, que la première venue comme moi, pauvre bonne femme ignorante et imbécile, qui ne connaît pas deux mots de raison, les ait retournés à la minute ! Monsieur le juge, moi je dis que, jusque-là, il leur avait manqué d’être bien appris et de savoir que le mal est le mal, car vous le voyez, en a pas fallu beaucoup pour les remettre dans le bon chemin. Et maintenant qu’ils y sont, c’est pour toujours, je veux bien le jurer encore la main en