Page:Yver - Cher coeur humain.djvu/20

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qu’il était de la pire confusion des idées et des faits ; les convulsions anticléricales des premières années ; l’agonie de l’École naturaliste : les premiers symboles et les premiers ballets russes ; les premiers Péguy et les premières vrilles de l’analyse psychologique ; les premiers avions ; les premières tolérances politiques ; les premiers silences de Déroulède, enfin la première guerre mondiale.

H… avait accompli, avec de si neufs et de si éclatants événements, les échanges d’usage, gardant néanmoins en sa cervelle ce diapason charmant sonné un jour, à ses vingt ans, par le Chat Noir, et ce sourire sur ses belles dents, photogravé dans tous les illustrés. Il ne s’affligeait pas de vieillir parce qu’il demeurait jeune. Mais depuis que s’était ouvert le nouveau siècle littéraire qui retardait de douze ans environ sur le calendrier, les quatorze lettres de son nom célèbre se volatilisaient lentement, insensiblement. Une jeunesse hâtive, forcée dans les serres de l’après-guerre, envahissait aujourd’hui les librairies, et, dans une féroce innocence, supprimait silencieusement les gloires anciennes. H… publiait encore de beaux livres, mais posthumes, et que la nouvelle génération apportait une sorte de zèle à ignorer.