Page:Yver - Cher coeur humain.djvu/72

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succès au Barreau ; et alors qu’à Paris, Olive le savait bien en les considérant de loin comme un troupeau inférieur de travailleuses, des centaines de jeunes bourgeoises étaient dans l’arène avec les hommes, toutes armées pour maintenir leur petit rang. Les unes, inféodées à l’administration de la République, dirigeaient des bureaux au ministère, les autres devenaient secrétaires d’ambassadeur, chefs de laboratoire dans les usines. Est-ce que, sur les chantiers du nouveau pont de la Lozère, Olive n’avait pas vu de ses yeux une jeune Parisienne de son âge qui commandait aux entrepreneurs ?

« Ma lignée à moi est donc trop lourde à soutenir ? » se demanda Olive.

Il ne s’agissait plus chez elle d’une mesquine dynastie de notaires ou de péagers de l’État. Douze cents ans durant, on avait pu conserver intacte dans sa famille la plus pure noblesse, laissant à d’autres le soin de besogner ; nul Charlemart n’avait jamais rendu à l’économie sociale d’autre service que celui des armes. Ainsi Olive demeurait-elle dans la tradition des siens quand elle s’en allait, le fusil à l’épaule, chercher la provende du lendemain. Elle avait, comme les Américains et les chevaliers du douzième siècle, la religion des armes. L’arme, épée ou arquebuse,