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XVII

En 1906 Antoinette mit au monde un garçon. C’étaient les jours où en pleine verdeur de sa puissance d’artiste Hyacinthe Arbrissel peignait pour le prochain Salon sa nouvelle étude de pugilat. Par sa fenêtre ouverte, la jeune mère, encore au lit et serrant contre soi le tout petit Arbrissel, voyait chaque jour gravir le perron du grand pavillon les deux puissants modèles aux épaules carrées balançant avec toute la légèreté de leur souplesse le poids lourd de leurs muscles puissants. C’était une gageure de l’artiste de reprendre ce thème après tant d’années. Il voulait une confrontation de son talent d’aujourd’hui à son talent de vingt ans plus tôt. Une expérience. Il entendait actuellement simplifier sa facture. Il se rappelait la phrase de Manet sur les rapports. Mais la musculature magnifique des deux colosses ne se réalisait pas automatiquement telle qu’il l’avait conçue en pensée. Mentalement, il travaillait jour et nuit. Un soir il alla voir l’accouchée et lui demanda de dénuder le poupon afin qu’il pût, dans un formidable