Page:Yver - Le Mystere des beatitudes.djvu/475

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Elle dit sans rougir :

— Quelle bonne journée !

Ils étaient si pressés de s’en aller à la barrière de Montreuil, qu’ils renoncèrent au café infect du restaurant et coururent au Métro, dès le dessert. Ils étaient heureux comme deux êtres qui ont réalisé dans la plénitude leurs plus profondes et leurs plus ardentes ambitions. Ils parlaient peu, séparés souvent par des voyageurs. Mais de loin, quand leurs regards se croisaient, ils s’adressaient un sourire de confiance absolue.

L’abbé Naïm n’était pas chez lui, et Désiré même était sorti ; mais la concierge les envoya dans la zone où, ajouta-t-elle, d’un air méprisant, ils trouveraient sûrement M. le curé,

— Tant mieux, dit Muzard, c’est là qu’il faut voir Naïm !

Ils pénétrèrent par la petite porte entre-bâillée dans la palissade verte. Là-bas, face à la cité des roulottes que décoraient des loques séchant au soleil, une grande baraque en bois s’était élevée. De loin, Muzard et Andrée Ornans virent une foule déguenillée se presser alentour. Ils s’acheminèrent vers l’entrée et durent, pour trouver la porte, fendre une masse d’hommes et de femmes malodorants.

À l’intérieur, de longues tables étaient dressées d’un bout à l’autre de la baraque ; des misérables y étaient assis et l’on aperçut l’abbé Naïm, une soupière au bras, allant de place en place, dis-