Page:Yver - Les Cousins riches.djvu/110

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pour cela même il est lucide et pénétrant. Je crois ce qu’il me disait ce soir. Notre famille entre dans un âge nouveau. Beaucoup de choses nous manquaient, et je ne parle pas ici du capital qui n’est qu’un moyen grossier, secondaire, quoique puissant. Nous vivions de traditions. Ces traditions sont des gardiennes et des nourrices. Elles ne sont pas des génératrices. Le devenir, comme dit Chouchou, dépend d’autre chose. L’immuable nous berce et nous continue, mais c’est le choc extérieur qui renouvelle, c’est-à-dire vivifie. Les fils Alibert sont entrés chez nous comme un printemps d’humanité. Nous ne pouvons méconnaître la beauté d’une race commençante. Ils vous ont séduit, mon ami, je l’ai vu, Moi aussi. J’aime leur force. Ils donnent une belle allure à la vie concrète. Ils sont les rois de la matière, ce qui est encore une souveraineté spirituelle. Les domestiques les ont entendus dire tout net qu’ils enverraient à l’usine trois moteurs afin de pouvoir arrêter la machine à vapeur et la vérifier à fond. Voilà ce qui s’appelle juguler d’un coup l’élément physique. Ce ne sont pas des rêveurs. Je sens qu’ils nous apprendront beaucoup.