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Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/335

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Michel dont le mouvement, les lumières la surprirent un peu ; et elle se rejeta d’instinct vers les ténèbres dans lesquelles était noyé tout le quartier du Luxembourg pour gagner, en biaisant, Saint-Sulpice et la rue Bonaparte. Elle n’avait pas peur. Elle marchait d’un pas si résolu, que pas un étudiant attardé n’aurait osé s’amuser du passage de cette jolie fille dont l’allure disait assez les alarmes. Comme elle se sentait grave et mûrie ce soir, comme la vie lui apparaissait nette et simple avec ses deux routes au tracé précis : le bien et le mal ! Et implacablement, elle en revenait à faire le procès de ses parents, s’irritant même contre eux, prête à leur crier la vérité, sanction de leur négligence, de leur incapacité.

Pourtant, en arrivant quai Malaquais, elle s’émut. Toute sa bonté se réveillait à la pensée des tortures qu’ils devaient endurer là-haut. Non, elle ne les accablerait pas trop vite. D’abord, elle serait rassurante, elle dirait : « Ne vous inquiétez pas… »

Quand elle ouvrit la porte de l’appartement, ce fut d’abord un grand silence. « Est-ce possible qu’ils dorment tous ? » se demanda-t-elle stupéfaite. Et elle alla frapper à la porte de ses parents. Mais la chambre était vide. Elle revint à l’atelier où la lueur jaune de sa bougie dansa dans les ténèbres. Alors elle entendit des voix, des bruissements dans la chambre de François, au bout du corridor ; et juste comme elle en approchait,