Page:Yver - Princesses de Science.djvu/121

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
111
princesses de science

— Non.

Et comme elle le voyait attendre le service, elle se décida — car enfin il était un peu chez elle ici — à l’avertir charitablement :

— On ne viendra pas : il faut que vous alliez là-bas, au fond. Vous prendrez une assiette et vous demanderez les choses qu’on mange aujourd’hui.

Il la remercia et suivit ses instructions. Dina sentait augmenter son trouble. Elle se disait qu’il y avait tout de même de la noblesse et de la bonté dans ce jeune médecin débutant, qui fondait une clinique gratuite pour ces gens du demi-peuple que l’hôpital refuse, pour ces petits employés à qui le médecin coûte trop cher. Et une grande douceur, en dépit d’elle-même, lui venait aussi, à cette pensée que, dans l’immense et cruel Paris qui l’écrasait sous son indifférence, quelqu’un l’aimait, pensait à elle, désirait son amour comme une grande faveur.

Il revint s’asseoir à côté d’elle, une tranche de bifteck saignant dans son assiette, et avec son bel appétit d’homme sain et actif, il commença de couper la viande dure. Alors, Dina trouva très bon de ne pas manger toute seule, de sentir vibrer près d’elle une âme qui ne s’exprimait pas, de respirer comme un parfum de tendresse. Elle lui savait gré de ne rien dire ; elle avait redouté une scène d’aveux, et voilà qu’il gardait un silence inexplicable.

— Vous n’aimez pas le vin ? demanda-t-il